ANTOINE-PHILIPPE DE LA TREMOÏLLE, 27 JANVIER 1794

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ANTOINE-PHILIPPE DE LA TREMOÏLLE, 27 JANVIER 1794

Lundi 27 janvier 1794  à Laval en Mayenne

Pendant que l’infâme Barère pérore à la tribune de la Convention jacobine : « Nous enseignerons le français aux populations qui parlent le bas-breton (Bretagne), l’allemand (Alsace-Lorraine et territoires voisins), l’italien (pays savoyard et Venaissin) ou le basque, afin de les mettre en état de comprendre les lois républicaines, et de les rattacher à la cause de la Révolution».

Antoine Philippe de la Trémoïlle (prononcer Trémouille)  est ramené de Vitré, où il était emprisonné dans les geôles du château, vers Laval. Il a été jugé selon les critères de la justice de l’époque c’est à dire de façon  normativement inique par Gabriel Vaugeois.

Antoine-Philippe de La Trémoïlle, prince de Talmont, prisonnier des Bleus pour ses menées contre-révolutionnaires, échappa à ses gardiens et rejoignit l'Armée Catholique et Royale lorsqu'elle s'empara de Saumur le 9 juin 1793.

Il participa à la Virée d'Outre Loire après la défaite de Cholet le 17 octobre 1793, ses troupes, ainsi que celles du Vicomte de Scépeaux sécurisant la rive droite de la Loire du côté de Varades, afin que les Vendéens puissent traverser le fleuve royal.

Après l'échec de Grandville, il aurait tenté de s'enfuir, avec d'autres (Solérac, Beauvollier, l'abbé Bernier) dont des femmes, en s'emparant d'une barque de pêche ; Stofflet l'aurait accusé d'avoir voulu déserter. Il prétendit qu'il voulait aller à Jersey chercher le secours des Emigrés qui s'y trouvaient. Il n’a jamais fait montre de lâcheté ; alors pourquoi en ce moment ? Il a toujours montré une grande pugnacité lors des combats, à Entrammes en particulier. Il aurait pu avoir un moment de découragement ; pourquoi pas puisque ce même sentiment atteignait les combattants, dont les Vendéens qui voulaient rentrer chez eux ? A-t-on jamais fait le reproche à Henri de La Rochejacquelein et à Stofflet d’avoir traversé la Loire à Ancenis le 19 décembre ?

Il va se distinguer à Dol, à Pontorson, à la bataille du Mans où il couvrit l'évacuation de la ville.

Il fut de tous les errements de la Grande armée catholique, du moins ce qu'il en restait, du Mans à Angers, puis à Ancenis - où il traversa la Loire avec Henri de La Rochejaquelein avant de retraverser pour rejoindre ses combattants qui n'avaient pu passer - jusqu'à Blain où il eut la déception - marquée par un violent coup de pied sur le plancher de la salle de la maison De La Brosse où étaient réunis les derniers chefs - de ne pas être élu généralissime de l'Armée moribonde. Il la quitta là afin de retourner dans son Maine.

ANTOINE-PHILIPPE DE LA TREMOÏLLE, 27 JANVIER 1794

Avec son fidèle domestique Matelein et Bougon (Jean-Charles Hippolyte Bougon-Longrais, ancien procureur-général syndic du Calvados) (qui seront guillotinés à Rennes), ils errèrent par Derval, La Guerche, la forêt du Pertre et se réfugièrent dans le moulin à papier de Malagra fin décembre 1793. Ils envoyèrent une jeune fille leur acheter du pain et  pour cela ils lui donnèrent des louis ce qui les fit repérer, le 30,  par la Garde nationale qui les interpella et les emmena à Fougères pour un premier interrogatoire.  Jusque là rien de grave. Hélas  pour eux, dans Fougères, une servante d'auberge reconnut Antoine-Philippe et dit « mais c’est le prince de Talmont ».  Il lui fut impossible de nier lorsqu’il fut interrogé par le général Beaufort. Peut-être est-ce lors de ce premier interrogatoire qu'il fit cette réponse restée fameuse : "Depuis quand es-tu avec les brigands ?" "Depuis que je suis en votre compagnie" !

Transféré à Rennes le 2 janvier pour être interrogé par Esnue-Lavallée, il contracta le typhus dans la prison insalubre où il fut enfermé. Il demanda son transfert à Paris pour être jugé par la Convention. L'ordre en fut donné. Esnue-Lavallée, craignant qu'il ne meure en prison décida de le déférer à la Commission de Gabriel Vaugeois, prêtre défroqué. De Rennes, Antoine-Philippe de La Trémoïlle fut donc transféré à Vitré où prisonnier et geôliers arrivèrent le 26 janvier ; le prince était très gravement malade. Comparaissant devant Vaugeois assisté de l‘Accusateur publique Volcler prêtre apostat lui aussi (ex curé et ex maire de Lassay (Mayenne), il fut immédiatement condamné à mort, sentence exécutoire dans les 24 heures. Vaugeois décida que l’exécution aurait lieu à Laval devant le château des La Trémoïlle.

ANTOINE-PHILIPPE DE LA TREMOÏLLE, 27 JANVIER 1794

 

Arrêtons-nous sur cet individu de Vaugeois : Né à Tourouvre dans l’Orne en 1753,  ordonné prêtre à Chartres, vicaire dans cette ville, puis Vicaire-général de Grégoire il quitte la prêtrise en 1792 ; c’est l’un des principaux organisateurs de l’attaque des Tuileries le 10 août. Ce renégat présidera la Commission militaire de Rennes et Vitré  du 9 novembre 1793 au 8 juillet 1794. A son actif 539 jugements dont 391 acquittements, 31 condamnations à la prison, 33 aux fers et 84 condamnations à mort ce qui fait quand même 15 % du total et le place dans les grands pourvoyeurs de la guillotine ! Parmi eux 14 prêtres guillotinés le 21 janvier 1794 pour l’anniversaire de la mort du tyran ! Il rendra son âme au diable, dans son lit, âgé de 86 ans, à l’Aigle(Orne) qui le porte dans la liste de ses personnalités en sa qualité d’historien !

Un itinéraire fut prévu et le cortège se mit en route, sous bonne escorte. Mais à la sortie de Vitré il fallut changer l'attelage et réquisitionner des chevaux d'artillerie. Dans le même temps il fut décidé de changer d'itinéraire. Jean Chouan, qui avait prévu de libérer le prince dont il était l'ami, fut prévenu par un messager. Hélas, Jean Chouan, était analphabète et ni lui ni personne de son entourage ne put lire le message.

Le cortège arriva à Laval, place de la Révolution où l'échafaud était dressé, là où avaient été tués les quatorze prêtres le 21 janvier. C'est à la nuit tombante que l'exécution eut lieu, à la lueur des flambeaux. La tête du prince fut installée sur un chandelier puis fixée sur une des piques de la grille du château, sa demeure.

 

ANTOINE-PHILIPPE DE LA TREMOÏLLE, 27 JANVIER 1794

La place de la révolution s'appelle maintenant place de La Trémoïlle, la boulangerie, sur le mur de laquelle est fixée une plaque, accueillit les spectateurs de la commission et de la municipalité. Le corps resta sur place jusqu'au lendemain et la tête d'Antoine-Philippe de la Trémoïlle; sur sa pique jusqu'au surlendemain. Puis le corps fut inhumé dans la fosse commune où les prêtres avaient été inhumés le 21 janvier, route de la Croix-Bataille. La tête le fut dans le jardin du château.

Le prince de Talmont avait 28 ans et quatre mois. C’était il y a 225 ans.

En 1994 pour le bicentenaire, le boulanger de l’époque se crut intelligent de mettre en vitrine des guillotines en nougatines ceintes du drapeau tricolore ce qui déclencha l’ire du Secrétaire général de la Chouannerie du Maine et la disparition desdites guillotines.

ANTOINE-PHILIPPE DE LA TREMOÏLLE, 27 JANVIER 1794
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