JEAN-JOSEPH MAURIN, YSSINGEAUX, 25 AVRIL 1794

Publié le par culture

JEAN-JOSEPH MAURIN, YSSINGEAUX, 25 AVRIL 1794

En Haute-Loire, sur la commune de Grazac entre Yssingeaux et le Puy en Velay se dresse une petite et modeste chapelle en haut d’un escarpement rocheux au-dessus du pont de La Sainte qui enjambe la rivière Lignon. Que signifie-t-elle ? Explication.

Ce vendredi 25 avril 1794 le Chouan Jean-Joseph Maurin aurait du voir sa vie s’achever, à 27 ans et deux mois, sous le couperet de la guillotine au Puy en Velay. Mais la Providence en a heureusement décidé autrement.

Jean-Joseph Maurin, né le 8 février 1767, se destinant à la vie sacerdotale, était élève au Grand séminaire du Puy en Velay ; il avait déjà reçu la tonsure et les ordres mineurs et devait être en troisième année. La révolution arrivant il voit les atteintes à la vie religieuse, la persécution qui s’installe et la fermeture de son séminaire en 1790. Insupportable. Il décide d’aller se battre pour ses convictions.

Dans un premier temps il part pour le Forez et sert sous les ordres du général Rimbert puis rejoint à Lyon le comte de Précy lors du soulèvement de la ville contre la Convention en septembre 1793. Il fait partie des plus intrépides Chasseurs du comte avec nombre de ses compatriotes yssingeois dont des nommés Abrial, Ferrier, Gamon.

Au poste de La Croix Blanche résistant aux hordes du Représentant en mission Couthon il est grièvement blessé par 17 fois, dans la nuit du 28 au 29 septembre 1793. Deux de ses camarades, Abrial et Ferrier, l’emmènent à moitié mort à l’ambulance installée par les Lyonnais dans l’église Saint Just puis à l’hôpital des Chazottes (ancien couvent) où il est soigné par le docteur Escoubas. Lorsque le comte de Précy réussit sa percée des troupes Bleus le 9 octobre il est trop faible pour pouvoir le suivre. Il sera sauvé par le docteur Escoubas qui le loge chez lui

Mais après l’échec du soulèvement une violente terreur est installée par Couthon d’abord, puis par Carnot et Collot d’Herbois ; elle fera en six mois 1880 victimes par la guillotine ou les fusillades à mitraille.

Le docteur Escoubas est dénoncé et allait être perquisitionné ; Maurin fut forcé de quitter son refuge. Heureusement il fut reconnu par un « pays », Richon, Dragon au Régiment de Lorraine, qui, apprenant sa triste situation l’emmena dans son logement où il le fit passer pour une recrue ; il le garda quelques jours jusqu’à sa totale guérison.

Constatant la meilleure santé de son nouvel ami, Richon fit prévenir un nommé Peyrache, aussi Chasseur, originaire d’Ecully  près du Puy en Velay, et tous les trois se dirigèrent vers un poste des Bleus qu’avec ruse ils passèrent sans souci les deux uniformes de Dragon écartant tout soupçon.

Une fois éloignés Jean-Joseph Maurin remercia chaleureusement ses deux comparses ; Peyrache emmena alors notre Chouan à Ecully et lui fabriqua un passeport qu’il fit viser par le Procureur de la commune. Etant en règle il put repartir pour Yssingeaux et alla se réfugier au château de Lapte.

Il ne sera pas tranquille longtemps ; certainement sur dénonciation les Gardes nationaux viennent le cueillir dans son refuge le 18 avril 1794. Il résiste et en tue deux. Il est emmené et emprisonné dans la maison commune d’Yssingeaux, l’ancien château des évêques du Puy en Velay. Il est condamné à mort le 21.

JEAN-JOSEPH MAURIN, YSSINGEAUX, 25 AVRIL 1794

Le 24 au matin il est enchainé ; cinq gendarmes et le bourreau forment son escorte pour l’emmener au Puy en Velay où doit avoir lieu l’exécution. Ses gardiens sont à cheval, lui  à pied et sa chaîne attachée à la selle d’un gendarme.

Arrivée au pont de La Sainte, sur la commune de Grazac, l’escorte est attaquée par ses amis Abrial, Ferrier et Gamon. Deux gendarmes sont tués les trois autres et le bourreau préfèrent prendre la fuite. Jean-Joseph ayant eu sa chaîne brisée roule dans les broussailles jusqu’au Lignon, la rivière qu’enjambe le pont de La Sainte.

JEAN-JOSEPH MAURIN, YSSINGEAUX, 25 AVRIL 1794

Ses amis le récupèrent et l’emmènent en lieu sûr au hameau de La Freyde niché à 900  mètres d’altitude au-dessus d’Yssingeaux.

A une date peu précise il quitte la région et part à l’île de Ré où il réside sous le faux nom de Baral. Le 18 août 1812 de retour à Yssingeaux il épouse Catherine Curssieu ; le couple aura deux enfants.

En 1815, après les Cent jours, il est nommé Receveur royal des finances.

Devenu veuf il épouse le 8 septembre 1829  Marie-Lucile Brette qui décède le 29 novembre 1854. Lui-même décède le 16 mai 1858 à l’âge vénérable de 91 ans et trois mois.

Quatre ans avant sa mort il avait fait édifier une chapelle (chapelette) au-dessus du pont de La Sainte, là où il avait été délivré par ses amis, en remerciement à Notre Dame de Bon Secour.

JEAN-JOSEPH MAURIN, YSSINGEAUX, 25 AVRIL 1794

Il sera un généreux donateur de sa commune et particulièrement de l’hôpital dont la chapelle désaffectée contient son unique portrait et un petit musée consacré à cette période trouble et sanglante.

JEAN-JOSEPH MAURIN, YSSINGEAUX, 25 AVRIL 1794

Sur sa pierre tombale, dans le cimetière d’Yssingeaux cet épitaphe « Sa mémoire sera chère à ses deux enfants, douce à ses nombreux amis, précieuse à son pays dont il fut le bienfaiteur, et à la religion dont il a été le disciple fervent, le confesseur et le martyr ».

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