24 AVRIL 1794, L’ABBE NICOLAS CORBILLE EST ASSASSINE

Publié le par culture

24 AVRIL 1794, L’ABBE NICOLAS CORBILLE EST ASSASSINE

Bouvron, Loire-Inférieure. Le Jeudi 24 avril 1794, dans l’Octave de Pâques, l'abbé Nicolas Corbillé est pris par les Bleus alors que, sous l’apparence d’un domestique, il est chez la veuve Perrine Guitton âgée de 64 ans et sa fille Marie âgée de 28 ans au hameau du Bas-Bezou ; ce hameau est situé sur le chemin qui va de Bouvron à Savenay où, quatre mois plus tôt, à un jour près, la Grande armée catholique et royale a été anéantie.

L’abbé est né le 10 mai 1755 à La Chapelle des Marais en pleine Brière, sixième de sept enfants. Il a été baptisé le même jour par l’abbé Philippe Thobye vicaire. Le 9 juin 1781 il avait été ordonné prêtre par Monseigneur Jean-Augustin Frétat de Sarra.

Il sera nommé vicaire à Bouvron dont le Curé est l’abbé Siméon François Delamarre (ou de Lamarre).

Lorsque les temps de la persécution arrivent il prête, à sa façon, le serment à la Constitution civile du clergé, tellement à sa façon que ce serment est refusé par le District de Savenay dont il relève. Il doit quitter Bouvron. Son Curé ayant refusé de prêter le serment, ne se sentant pas concerné à cause de son âge, est lui aussi obligé de quitter sa paroisse et va se réfugier à Nantes en la maison Saint Clément (actuelle caserne des pompiers). Il sera très vite incarcéré dans la prison des Carmélites (dont une partie des bâtiments subsiste) puis dans l’ancien couvent des Petits Capucins devenue prison (sur la butte Sainte Anne mais totalement disparu) avant d’être enfermé sur le vaisseau La Gloire et noyé en  Loire dans la nuit du 16 au 17 novembre 1793 à l’âge de 70 ans.

L'abbé Corbillé aurait pu s’expatrier vers l’Angleterre, la Belgique ou l’Espagne ; il juge nécessaire d’assurer sa mission sacerdotale pour le bien de ses ouailles. Il chevauche, marche, court la campagne assure son devoir de prêtre, baptise, marie, enterre, sur la paroisse de Bouvron mais aussi à Campbon, Malville, Fay de Bretagne, Blain.

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Sans relâche. Il célèbre là où il est reçu ou à l’extérieur des chapelles fermées en novembre 1793 sur ordre de la Convention ; c’est le cas pour celle dédiée à Saint Roch, à 2 kilomètre de Blain sur le chemin de Notre Dame des Landes, dont il était prêtre habitué ; la chapelle, édifiée en 1450 (restaurée au XIXème siècle) est fermée alors il célèbre au bas du chevet. Un rocher, orienté vers le Levant, lui sert d’autel.

24 AVRIL 1794, L’ABBE NICOLAS CORBILLE EST ASSASSINE 24 AVRIL 1794, L’ABBE NICOLAS CORBILLE EST ASSASSINE

Il est activement recherché.

Ce triste jeudi, il y a 230 ans, il est réfugié au Bas-Bezou lorsque les Bleus surgissent sans doute suite à une dénonciation. Une fouille rapide révèle des objets en rapports avec la religion ; près du foyer, dans un récipient trois poissons. Interrogés les voisins reconnaissent bien les deux femmes et l’homme comme leur domestique. Mais emmenés tous les trois à la maison commune de Bouvron l’homme est reconnu comme l’abbé Corbillé. L’abbé est fermement lié avant que les trois soient emmenés à Savenay.

Prétextant un besoin urgent à satisfaire l’abbé est détaché par ses gardiens ; il en profite pour s’échapper, il a 39 ans (moins 16 jours) est souple et svelte. Il saute le mur du presbytère et court vers la chapelle Saint Mathurin (disparue elle se dressait à l’emplacement du calvaire actuel) mais un Bleu le met en joue et l’abat d’un coup de fusil dans le dos et le traîne par les cheveux jusqu’à l’église qui était sur la place. On l’adosse au mur de la sacristie et il est fusillé ; ses deux protectrices l'encadrent mais lui seul est fusillé.

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L'abbé est enterré immédiatement sur le lieu de son exécution (là ou se trouvait la croix à gauche de l'église) ; la veuve Guitton et sa fille sont emmenées au district à Savenay, puis à Nantes. Elles y disparaîtront, dans une prison : les Saintes Claires? le Bon Pasteur ? Mystère. Une chose est sûre: elles ne reviendront pas.

En 1846, la création de la route de Nort sur Erdre à Pont Château entraîne la désaffection du cimetière qui entourait alors l'église de Bouvron. L'abbé Nicolas Corbillé est exhumé. J'ai entendu dire que son corps était intact. Vérité, légende ? Il est maintenant dans l'ossuaire du nouveau cimetière, mêlé à ses paroissiens. La vieille église a été démolie et remplacée par une nouvelle en 1895. La place, sur laquelle elle se dressait et dans laquelle a officié l'abbé Corbillé, porte son nom. En 1994, l'évêque de Nantes, Monseigneur Émile Marcus, a présidé une messe d'hommage à l'abbé Nicolas Corbillé, entouré de nombreux prêtres et d'une très belle assemblée.

Dans l'église actuelle, le maître autel de l'ancienne église a été conservé, dans le transept gauche, à gauche de l'orgue. Il porte toujours les initiales entrelacées du saint Patron: Saint Sauveur.

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Trois statues du XVè-XVIè, Saint Jacques, Saint Jean et Saint Mathurin sont aussi le souvenir de l'église démolie. Pensons, avec émotion, que l'abbé Nicolas Corbillé s'est recueilli devant elles.

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Le nom de ce Confesseur de la foi ne figure pas dans le registre des décès de l'époque compulsé à la mairie de Bouvron. Je l'ai constaté. N'y figurent pas non plus les noms de ceux tombés les armes à la main ; ils n’étaient que des "Brigands".

 

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