SAINT HILAIRE DE MORTAGNE : Qui veut noyer son chien l’accuse de la rage…
Qui veut détruire son église l’accuse de mauvais état.
Vendredi 6 juin dernier, l’Association « Mortagne Patrimoine de Vendée » (2 bis rue du calvaire 85290 Saint Hilaire de Mortagne) avait invité à une soirée d’information dans la salle municipale de la commune sur l’avenir de l’église de Saint Hilaire de Mortagne :
"Oui à l’église Saint Hilaire de Mortagne, non aux bulldozers de Gesté"
" Pourquoi et comment sauver notre patrimoine ? L’exemple de Saint Hilaire"
C’est devant une salle comble de plus de deux cents personnes que le Président de l’Association de sauvetage, Claude Barré, présenta ses invités :
Monsieur Guy Massin-Le Goff, Conservateur départemental des antiquités et objets d’art sacré du Maine et Loire.
Monsieur Julien Bourreau, conservateur des antiquités et objets d’art de la Vendée,
Monsieur Christophe Lauvergeon, administrateur de l’Observatoire du Patrimoine religieux,
Monsieur Matthieu Le Truëdic, économe Diocésain, Diocèse de Vendée, représentant Monseigneur Alain Castet, évêque de Luçon.
Christophe Lauvergeon fit un historique des édifices religieux et plus particulièrement catholiques, leurs époques de construction ou de reconstruction, en Vendée (pas dans la seule Vendée mais dans l’Ouest, note SCB) ravagée par la barbarie révolutionnaire. Leur date de naissance ou re-naissance s’établit entre 1830 et 1905. Ces églises reconstruites sur des ruines éradicatrices de la religion catholique marquent la volonté des aïeux de redonner foi en l’Avenir. Ces derniers mots donnent la raison de ces constructions-reconstructions. (et la raison de leurs nouvelles « déconstruction » dans une nation en panne d’Espérance ?). Il pense (comme il me l'a dit avant le début de la réunion) que le petit film du Souvenir Chouan de Bretagne, qui circule sur Internet, a fait prendre conscience de ce qu'est la démolition d'une église.
Guy Massin-Le Goff fit un exposé, appuyé sur un riche diaporama, très émouvant, sur les églises menacées ou déjà démolies, en particulier dans le Maine et Loire champion dans ce domaine. Pourtant ces églises du XIXème siècle sont les témoins d’une conception architecturale nouvelle par l’emploi des matériaux, le mobilier et l’art du vitrail, citant en particulier Roger Degas très inspiré dans la réalisation de ses cartons, calques, puis de ses vitraux. Monsieur Massin-Le Goff, le seul vrai spécialiste de l'art du vitrail post révolution, montre en particulier la messe blanche : Avant de partir en exil, le curé de Saint Hilaire avait fixé à ses paroissiens des jours et heures où, réunis devant l’église définitivement fermée, il dirait au même moment la messe à l’étranger. En communion. Monsieur Le Goff insiste bien sur la spécificité d’une église dans une ville ou un village. qui est rabaissé au rang de hameau si l’on détruit son église.
Julien Bourreau a réalisé une plaquette sur l’intérêt architectural et patrimonial de l’église. Il revient sur les différents vitraux, la statuaire (Saint Hilaire, Saint Sébastien entr’autres) et sur les éléments architecturaux telle cette porte de l’ancienne église incluse dans la construction de 1903. Malgré le défaut d’entretien depuis plus de 20 ans et la fermeture depuis 2007, cette église se porte plutôt bien.
Matthieu Le Truëdic est venu dire que le clergé affectataire, le curé et l’évêque du Diocèse avaient signifié à la municipalité leur refus de la démolition de l’église. (Ce qui est un élément de soutien pour l’Association de défense du Patrimoine, soutien qui, à Gesté, a fait défaut à l’Association ; en effet le curé du lieu et Emmanuel Delmas, évêque d’Angers s’étaient prononcés pour la destruction). Il fera un grand effet en annonçant à la fin de son exposé : Que la déconstruction de l’église Saint Hilaire n’était plus à l’ordre du jour. A la suite d’une réunion des élus, des représentants de Monseigneur Castet en présence de Bruno Retailleau, Président du Conseil Général de la Vendée.
Le mini-film « Exécution de l’église de Gesté »réalisé par le Souvenir Chouan de Bretagne fut projeté après que son Président ait demandé (et obtenu) la parole pour le présenter. La projection de ce document – merci Yves - devant des personnes dont aucune n’a assisté à la démolition de cette église (et au drame que cela représente) a sensibilisé les spectateurs dont certains indécis. Deux individus seulement ont rignoché.
Un membre de l’Assemblée demanda ensuite la parole à Claude Barré pour rappeler ce qu’était une église pour un catholique. Et, audace, il demanda à l’assemblée de se lever pour chanter le « Je vous salue Marie ». De très rares personnes restèrent assises.
Le verre de l’amitié offert par « Mortagne Patrimoine de Vendée » permit de faire connaissance et clôtura cette belle réunion.
Il n’empêche que l’Association doit rester vigilante tant que l’arrêté municipal de juillet 2013 n’a pas été abrogé.A Gesté, faut-il rappeler que la Colonne Municipale menée par le général Léger, s’était assise sur les décisions du Conseil d’Etat, de la DRAC, du Tribunal administratif de Nantes interdisant la destruction. Et que, finalement, sept mois après, le Conseil d’Etat avait levé son interdiction devant le fait accompli !
Alain Brochoire, maire de Mortagne sur Sèvre était présent, ce qui m’a permis de le remercier pour son geste d’acceptation de la discussion et de la contradiction face à la municipalité. Me répondant que c’était la règle normale je lui soulignais qu’à Gesté le général Léger n’avait pas accordé de salle pour l’Association Mémoire Vivante du Patrimoine Gestois qui avait fait sa soirée d’information dans une arrière-salle de bistrot.
Pour mémoire les évêques qui ont trouvé la solution à la raréfaction des fidèles : Plus une église est petite, plus les fidèles semblent nombreux !
-Jean Orchampt, évêque d’Angers de 1974 à 2000, on lui doit la destruction de l’église Notre Dame du Fief Sauvin (remplacée par une construction moderne qui sera comment dans 150 ans ?) et, après tempête : Notre Dame de Villeneuve (du Fief Sauvin) remplacée par une sorte de hangar.
-Jean-Louis Bruguès, évêque d’Angers de 2000 à 2007; on lui doit la destruction de l’église Saint Joseph de Saint Georges des Gardes ; un hangar, appelé Supérette par les habitants, la remplace.
-Emmanuel Delmas évêque d’Angers, depuis 2008, on lui doit la destruction de Saint Aubin du Pavoil (au nord de Segré) reconstruite dans un style béton-ferraille et Saint Pierre aux Liens de Gesté. Dans le cas de cette dernière église due, pour la partie néo-gothique, à l’architecte Alfred Tessier, il faut rappeler qu’elle n’a pas été désacralisée. Son exécution se double donc, de plus, d’une profanation.
Qu’est-il reproché à l’église Saint Hilaire ? Accusation imparable : sa vétusté ! Et c’est ensuite ce qu’ânonnent en boucle les partisans de la déconstruction, terme pudique dissimulant le terme vrai : démolition.
Mais comme l’ont rappelé les divers orateurs de la soirée, dès qu’un bâtiment n’est plus entretenu régulièrement il devient sensible, aux éléments et .aux prédateurs. Les municipalités doivent donc entretenir le patrimoine que l’Etat a volé à l’Eglise en 1905 et leur a confié ; elles n’en sont que les gestionnaires passagers dans l’histoire de ces édifices et du pays.
Il faut remarquer aussi que, étrangement, tous les devis de travaux évoluent dans une fourchette de 1.300.000 € à 3.000.000 €.
A Plounerin l’estimation était de 1.350.000 € (comme à Gesté !). Après le référendum et l’abandon de la démolition, la facture de restauration fut inférieure à 500.000€ dont le quart est couvert par des mécènes.
A Gesté, les frais de démolition ont été supérieurs aux frais de restauration ; et maintenant il faut construire la citerne.
L’argument du style architectural qui ne représente rien est une absurdité ; le néo-gothique, comme le néo roman, est un art à part entière aussi respectable que le style Le Corbusier ou mérovingien.
Espérons que les Mortagnais échapperont au triste spectacle suivant :