SAVENAY, NANTES, NOIRMOUTIER RETROSPECTIVE D'IL Y A 225 ANS

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SAVENAY, NANTES, NOIRMOUTIER RETROSPECTIVE D'IL Y A 225 ANS

 

RETROSPECTIVE des évènements sanglants d'il y a 225 ans vus à travers les archives du SHD à Vincennes.

Ancenis 20 décembre 1793. Lettre d'un dénommé Rothe au général Desclozeaux le 30 frimaire an deux : « citoyen, voici les nouvelles que vous apporte le capitaine Le Breton parti d'Angers à 11 heures du matin le 30 frimaire. L'ennemi a passé (La Loire note SCB) à Ancenis  sur des poutres et bateaux qu'ils avaient apportés de l'étang voisin, au nombre d'environ 2000 mais  qui ne sont que dans l'île de ? (Macrière, Baudonnière ?) ; 2 à 3000 autres se sont noyés, les autres dispersés sur les campagnes où les paysans les tuent et les hachent sans commisération. Le secrétaire d'un chef de brigands à assuré ces faits et a dit en outre que 4 à 5000 autres brigands des plus opiniâtres se portaient sur l'Erdre (Erd dans le texte) ; que cette nouvelle a été confirmée par un envoyé de l'armée républicaine qui était à leur poursuite ces derniers n'ayant jugé suivre les autres sur la rive de la Loire.

La Rochejacquelein n'est point mort puisqu'il a été le premier à passer l'eau à Ancenis, Stofflet l’a accompagné, ce qui a mécontenté les soldats de l'armée catholique de voir les chefs les premiers à passer, ils ont failli l'assassiner de rage ; on attend dans la journée un général des brigands fait prisonnier, la Durandière, ci-devant juge à La Flèche et en arrestation à Angers avec ses deux filles.

Il a passé avant-hier 150 prisonniers de Nantes que l'on conduit à la Convention, accusés d'avoir voulu vendre la ville, Perrotin fils, de Parcé, est du nombre (affaire des 132 Nantais de Carrier note SCB).

Voilà tout ce que je puis vous dire pour le moment, salut et fraternité, signé Rothe (ou Mothe ou Nothe) ».

 

Savenay 23 décembre 1793, lettre des représentants Prieur et Turreau : « Piron commandant de la cavalerie brigantine et qui montait le cheval blanc si fameux dans l'histoire de la Vendée, a été tué en combattant par un maréchal des logis de la légion du Nord ». Un autre texte signé Mirbel : « le 9 nivôse (29 décembre) à Redon, le reste de la cavalerie au nombre d'environ 160 a été chassé d’un bois où il s'était réfugié et s'est embourbé dans un marais où ils ont été fusillés. Piron commandait cette poignée de scélérats ».

 

« Savenay est à nous. Nous y fîmes une boucherie horrible, les dernières six pièces de canon, quelques caissons, équipages, trésor, tout est en notre pouvoir. Marceau et les autres généraux avec les Représentants du peuple Prieur et Turreau suivirent l'ennemi sur la droite, très peu leur échappèrent ; partout on ne voyait que des monceaux de corps ; moi je me suis attaché à quelques pelotons de cavalerie et d'infanterie qui s'était sauvés sur la gauche, tous furent noyés ou taillés en pièces. Les brigands qui échappèrent cette journée à la mort furent traqués, tués ou malmenés par les habitants des environs. Dans les- ?- de Savenay seul, plus de 6000 ont été enterrés. C'est ainsi qu'une armée forte au Mans, le 22 frimaire, de 80 à 90 000 hommes fut complètement détruite dans 12 jours par le génie et le courage des soldats républicains qui tous, pour ainsi dire, ont amassé des trésors de dépouilles des ennemis de la république ». Signé Westermann.

Campagnes de la guerre de Vendée du général de brigade Westermann commandant en chef de la légion du Nord, contenant tous les faits à sa connaissance sur lesquels la Convention et son Comité de Salut Public lui ont demandé des détails.SHD B5/7-97 (On ne voit dans ce texte aucune des déclarations prêtées à Westermann par Jacques Crétineau-Joly et reprises à tire-larigot par de multiples écrivains. Note SCB).

 

Dominique Alexandre Jaudonnet de Laugrenière, fils de Philippe-René Jaudonnet seigneur de Laugrenière, né et baptisé le 10 décembre 1745 à Moustier sous Argenton dans les Deux-Sèvres a été mousquetaire du roi entre 1762 et 1767. Le 8 juillet 1783 il a épousé Marie-Perrine de Fressinet, âgée de 23 ans, en l'église de la Trinité à Angers. Le couple a eu trois enfants : Dominique-Claude né en 1784, Alexandre-Luc né en 1786, Marie-Thérèse née en 1790 et vraisemblablement décédée en bas âge.

En ce temps de soulèvement il est chef de la cavalerie vendéenne, il a fait toute la campagne d'outre Loire et il est là à Savenay avec le troupeau pitoyable des restes de l'armée catholique et royale par un temps lugubre.

 

Savenay Montoir : « Rien n’est comparable à l’opiniâtreté que l’ennemi a montré à Savenay et à Montoir et cela vient de la subite conviction qu’il avait que nous ne faisions pas grâce aux ennemis de la république. enfin ébranlé par une attaque aussi impétueuse que spontanée il a fui pour pouvoir se dérober à nos coups. toute leur infanterie est détruite et leur artillerie en notre pouvoir. 200 cavaliers environ se sont échappé en traversant les marais que nous n’avons pu franchir. il était nuit. le lendemain on devait les cerner ».

 

Jaugrenet fait-il partie de cette troupe ? Il est dit qu’il fut fait prisonnier durant la Bataille de Savenay ; sans jouer sur les mots, il dit lui-même qu’il s’est rendu volontairement à Marceau, le 26 ou le 27 décembre, date à laquelle il signe son Mémoire destiné à Prieur de la Marne. Cela rejoindrait cette histoire des 200 cavaliers qui se rendirent à Marceau en promettant de servir la république. Ils furent emmenés au Bouffay et, sur ordre de Carrier, guillotinés.

Il était accompagné de son fils aîné Dominique-Claude (9 ans), dont il fut séparé. Sa femme Marie-Perrine avait été tuée à Cholet le 17 octobre et il n’avait plus aucune nouvelle de son fils Alexandre-Luc (dont on perd toute trace alors que Dominique–Claude a vécu jusqu’à 1819 et eut trois enfants). Serait-ce lui qui fut recueilli par un républicain à Savenay ? Est-ce par désespoir  ou par simple soif de la vie que le Chevalier propose de collaborer avec les républicains ? Il adresse donc un long Mémoire à Prieur de la Marne racontant toute l'histoire du soulèvement depuis Cathelineau et se proposant même de guider les républicains à la poursuite de Charette revendiquant même son accord avec les idées républicaines. Il offre de révéler tout ce qu'il savait sur la lutte fratricide qu'il croyait finie.

« Il jure sur son honneur qu'il va donner connaissance de tout ce qu'il sait ». Il termine par « Savenay 7 nivôse an II de la république (27 décembre 1793) et j'ajoute à ces écrits une vérité dont on doutera, que je fais le serment devant l'Eternel et sur ce que j'ai de plus sacré, de servir la république avec tout le zèle du plus franc républicain et de répandre jusqu'à la dernière goutte de mon sang pour elle. Signé de Laugrenière ».

 

Il est emprisonné à Nantes, au Bouffay, et le 30 décembre il adresse cette supplique « aux citoyens représentants du peuple, près les armées réunies contre les rebelles de la Vendée, auxquels il s'est rendu volontairement et qui l’ont pris sous sa protection, le renouvellement de son serment le plus sacré et d'être fidèle au gouvernement républicain de faire dans le moment présent tout ce qui dépendra de lui pour convaincre de ses sentiments républicains ». Il exprime « son repentir d'avoir tant tardé à rentrer parmi les hommes qu’il voit bien n’avoir d'autre but que le bonheur de tous ». Il expose que « dans la déroute il a été séparé de l'un de ses enfant âgé de huit ans et de leur gouvernante qui a ses assignats et qu'il est sans le sol ». « Je suis malheureux je perds plus de 800 000 livres, je suis père de deux enfants, l’un âgé de neuf ans l'autre de huit. C'est avec l'aîné que je me suis présenté à vous et je ne sais ce qu'il est devenu. J'ai perdu mon épouse à Cholet, enfin j'ai tout perdu si ce n'est votre protection et c'est sur elle que je fonde toutes mes espérances. Je suis acquéreur de biens nationaux ecclésiastiques j'ai acheté une cure et un prieuré qui m'arrondissaient. C'est ce qui m'a rendu criminel vis-à-vis le paysan et l’Église. Aussi les paysans sont arrivés chez moi en foule, m'ont incendié et m'ont fait sortir de chez moi pour me mettre à leur tête. J'y ai été pendant quelque temps et ne m'en suis pas retiré, à la vérité que je l'aurais pu ; mais je le jure sur ce que j'ai de plus sacré que je n'étais plus rien à l'armée des rebelles dès la perte que j'ai faite de mon épouse à Cholet et que j'ai saisi les circonstances de sa vedette avec toute envie de me rendre à l'armée république qui m'a témoigné tout ce qu'on peut espérer de sa franchise, d'avoir sa parole d'honneur si et celle des représentants du peuple ; je suis resté tranquille dans ma prison ».

Quelle souffrance morale a du éprouver cet homme !

A suivre demain.

 

SAVENAY, NANTES, NOIRMOUTIER RETROSPECTIVE D'IL Y A 225 ANS
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