Verneuil sur Avre est située dans l'Eure à 70 km d'Alençon et à 110 de Paris.
Le 18 février 1800 Louis de Frotté et ses six compagnons d’infortune sont abattus après une parodie de procès sur ordre de Bonaparte 1er Consul.
Louis de Frotté, né à Alençon le 5 août 1766, avait été baptisé dans la foi catholique, sur insistance de sa mère mais, après la mort de sa maman alors qu’il avait sept ans, vivant dans une famille protestante il en pratiqua la religion. Mais toujours il resta fidèle au Roi très chrétien qu’il servit et auquel il attesta de sa fidélité en luttant contre la révolution et ses séquelles, la république sous ses formes différentes : Directoire et Consulat.
Il servit le Roi dès 1781 et jusqu'à 1792, avant de rejoindre les armées du duc de Brunswick, étant à ses côtés lors de l'affaire de Valmy où eurent lieu les traficotages maintenant avérés pour laisser la victoire aux armées révolutionnaires. Il émigre en Italie, puis en Allemagne avant de rejoindre les émigrés en Angleterre.
Mais Louis de Frotté est aussi un grand de la Chouannerie qui souleva toute la Basse Normandie après y être revenu au début de 1795 ; il eut sous ses ordres jusqu'à onze mille hommes qu'il entraînait ou faisait entraîner tous les jours, marche, tir, initiation au combat et à l'embuscade, leur apprenant à tout connaître d'une guerre ordinaire ou de guérilla. Il refusa les accords de La Mabilais (comme Cadoudal).
Un lecteur a précisé que Protestant par culture familiale, bien que baptisé dans le catholicisme maternel, c'est « par solidarité avec les nouveaux persécutés royalistes et catholiques que Louis de Frotté, resté monarchiste comme bien d'autres protestants, a pris la tête du mouvement royaliste en Normandie ».
Mais il fut bientôt confronté à Hoche qui avec ses bataillons convertissait à la paix, de gré ou de force, les régions soulevées de la Loire à la Bretagne, s'était débarrassé de l'affaire de Quiberon où les Anglais n'ayant pas joué franc jeu (voir La Revue du SCB N° 40 et 41).
L'Agence Royaliste de Paris (émanation de Louis XVIII), qui comptait d'anciens conventionnels dans ses rangs et le curieux Père Brottier (et non abbé car il était moine), était pour une royauté constitutionnelle dont le roi Louis XVIII aurait eu pour premier ministre Buonaparte. Elle avait eu un comportement curieux lors du débarquement de Carnac le 27 juin 1795 et lors de l’Affaire de Quiberon, et un rôle pas très clair lors du périple qui avait vu l’embuscade de Coëtlogon. Ceux qui enrayaient ses plans fumeux étaient condamnés.
En Novembre 1799 Frotté est à la tête d’une armée de 10.000 hommes et la victoire de Pacy sur Eure le met à 85 kilomètres de Paris !!
Après la prise d’Argentan le 21 Janvier 1800, Buonaparte lance contre les derniers Chouans 60.000 hommes. Frotté décide de négocier, pendant que Georges livre bataille au Pont du Loc’h dans le Morbihan. Sur décision du Premier Consul, le général Hédouville qui commandait la pacification dans l’Ouest (Louis Lazare Hoche étant décédé en Allemagne en 1797) offre à Frotté de parlementer.
Mais il avait eu l’occasion de montrer tout son mépris à Buonaparte qui fera du comte son ennemi personnel. Le général Brune Le commandant en chef des Forces de l’Ouest lui donne ainsi qu’à ses compagnons un sauf-conduit pour rejoindre Alençon le 15 Février 1800.
Ce fut le général Guidal qui fut chargé des formalités et fit remettre convocation et sauf-conduit pour Louis de Frotté et ses six officiers (Isaac Dumont de Lamberville, baron du Hum, baron d’Hugon, baron de Commarque, Florent-Martin d’Hauricourt et Pascal Sechiordi) pour qu’ils se rendent à l’hôtel du Cygne à Alençon.
Le 15 février 1800 à minuit, après deux jours sans aucune discussion sur une éventuelle soumission, Guidal partit ; des grenadiers vinrent faire prisonnier les sept officiers Chouans. A Frotté qui s’insurgeait devant cette façon d’agir il fut répondu que les sauf-conduits avaient expiré à minuit et qu’ils allaient être conduits à Paris. Un courrier est envoyé à Bonaparte aux Tuileries.
Sous très forte escorte, les prisonniers prirent la route le 16. Le 17 ils arrivèrent à Verneuil sur Avre vers la mi-journée. Au moment de repartir un ordre arrive de Paris ordonnant d’organiser une Commission militaire pour juger les 7 Royalistes. Ce qui est fait le 18, sans avocat, sans Appel, sans Cassation, comme au "bon vieux temps" de Fouquier-Tinville ! Un seul verdict : la mort.
Le comte de Frotté demande une bouteille de vin et des verres. Les sept officiers Chouans trinquent en clamant " Vive le Roi ", brisent leurs verres et la bouteille en les jetant contre un mur. A cinq heures de l’après-midi, ils sont emmenés sur le lieu de la mise à mort, (marqué maintenant par un menhir du Souvenir de la Chouannerie Normande inauguré en octobre 1973).
Une autre version de leur exécution est aussi plausible, c’est celle que j’ai entendu lors du 200ème anniversaire : ils auraient été exécutés le long du mur du cimetière et leurs corps balancés par dessus et inhumés tardivement.
Louis de Frotté et ses compagnons font face aux treize hommes du peloton (treize balles pour six hommes !) ; le coup de grâce est donné aux victimes dont les souffrances cessent enfin.
Leurs restes exhumés de la fosse commune sont déposés dans la crypte de l’église de la Madeleine en 1814. En mars 1826 David d’Angers livre un cénotaphe, une plaque mémorial en marbre de Carrare sculptée faisant le rapprochement avec les frères Macchabées de l’Ancien Testament.
Le 19 février 2000 une remarquable journée du Souvenir présidée par Jean-François Chiappe, organisée, avec la participation de nombreuses Associations, par le Cercle Louis de Frotté, Présence de La Varende et la Chouannerie Normande, débuta par la messe de Requiem célébrée en l’église de La Madeleine, bondée ; le maire UDF Pétiet, venu avec un grand nombre de ses conseillers municipaux, fit un historique à la fin de la cérémonie. Des gerbes furent ensuite déposées au pied du monument sous une pluie torrentielle ; ce fut là le baptême du tout neuf drapeau du Souvenir Chouan de Bretagne.
204 privilégiés se retrouvèrent pour un réconfortant repas dans une salle bien chauffée ce qui permit de se sécher. Les représentants des associations furent invités à monter sur scène pour présenter leurs associations. Je fus même exceptionnellement autorisé à faire appel aux dons pour notre monument du Pont du Loc’h.
L’après-midi une visite des lieux historiques de Verneuil sur Avre fut menée par l’adjoint à la culture. J’avais appris que le maire UDF Pétiet avait récupéré, sans vergogne, les lauriers de l’accueil de la ville alors qu’il était formellement opposé à toute cérémonie. C’est l’Adjoint à la culture qui avait forcé la municipalité à l’organisation, au nom de l’Histoire.
Lors de la visite je m’approchais de l’Adjoint et après les politesses d’usage je lui demandais : Monsieur Lep.. ayant appris vos idées politiques je ne comprends pas qu’un communiste ait voulu cette journée du souvenir d’un noble car c’est grâce à vous, contre l’opposition du maire, qu’elle a eu lieu ?
"Monsieur, Louis de Frotté s'est levé contre la dictature et pour défendre le peuple opprimé par la bourgeoisie parisienne."
Etonnant, non ?