PERE PAUL DONCOEUR : NOUS NE PARTIRONS PAS !!! Un prêtre qui aurait été Chouan !

Publié le par culture

PERE PAUL DONCOEUR : NOUS NE PARTIRONS PAS !!! Un prêtre qui aurait été Chouan !

Il y a un siècle.  Depuis le 11 novembre 1918, le Père Jésuite Paul Doncoeur arpente le champ de bataille de 14-18 pour exhumer et inhumer dignement les soldats morts au Champ d’honneur. Et en septembre 1919 il a béni le monument qu’il a érigé et fait ériger pour 147 soldats.

Né à Nantes le 6 septembre 1880 (et déclaré le 8) Paul, Jules, Eugène, Damiette, est le fils de Georges Doncoeur (32 ans), sous-lieutenant au 25ème régiment de Dragons, demeurant Quai Richebourg, et de Léonie Rose Legrez (20 ans) son épouse.

[Le Quai Richebourg n’existe plus depuis le comblement de la Loire entre 1930 et 1941 ; son nom est maintenant Allée du commandant Charcot.]

Son quatrième prénom, Damiette, provient de ce que Saint Louis avait associé aux Doncoeur le nom de cette ville priser par leur ancêtre lors de la 7ème Croisade.

Aîné de huit enfants élevés dans la foi catholique il découvre sa vocation religieuse alors que son père est en garnison à Verdun ; il a onze ans. S’en confiant à son père celui-ci accepte mais exige : « Mon fils je suis d’accord pour que tu serves Notre Seigneur mais à condition que tu sois un saint prêtre. Je ne conçois que de saints prêtres ». Il poursuit ses études chez les Jésuites à Reims. IL entre au noviciat que les Jésuites ont conservé près d’Amiens, à Saint Acheul, malgré les lois d’expulsion Jules Ferry de 1880 mais celles-ci visaient, dans un premier temps, les établissements d’enseignements secondaires et supérieurs.

Mais en 1901 Waldeck-Rousseau, grand démocrate, radical-socialiste et Franc-maçon, fait voter la loi sur les Congrégations et leur expulsion ; sauf à demander leur intégration. Les Jésuites et leur général refusent cet asservissement ; Paul Doncoeur, comme les autres Jésuites, prend le chemin de l’exil et va en Belgique poursuivre ses études. Entre 1901 et 1909 les attaques contre l’Eglise de France se poursuivent avec l’appui d’un Clemenceau et d’Emile Combes, ancien grand-séminariste (il a reçu la tonsure), radical-socialiste et Franc-maçon. En décembre 1905 c’est la loi de séparation des Eglises et de l’Etat ; qu’il serait plus juste d’appeler Loi de séparation de l’Etat et de l’Eglise car l’Eglise n’a rien demandé et s’est trouvée confrontée à un diktat !

Paul Doncoeur suit, meurtri, ce combat de la Belgique puis de Jersey où les Jésuites ont créé un séminaire florissant à Saint Hellier. Puis il revient en Belgique au séminaire d’Enghien. C’est là qu’il recevra le sacerdoce en 1912.

Le Père Paul Doncoeur rentre en France et s’arrête à Lille où il va à l’évêché solliciter de Monseigneur Alexis-Armand Charost, évêque, la possibilité d’être aumônier militaire. En effet tous les Membres de Congrégations religieuses expulsées sont automatiquement réformés et considérés comme inaptes au combat. Ce qui les différencie des Prêtres-soldats (il serait plus logique de parler de soldats-prêtres car ils ont été mobilisés en tant que citoyens-soldats et non comme prêtres). Le Père Doncoeur va arriver, en forçant, à se retrouver comme aumônier auxiliaire, sans solde. De là il va, à cause des circonstances effroyables de la guerre, se retrouver en première ligne car, ainsi qu’il le disait à Foch, son sacerdoce le plaçait avec les vivants plutôt qu’aux arrières avec les morts.

Affecté à la 28ème compagnie, enfin fait aumônier titulaire à cause de sa bravoure, il subit le feu des combats, va entre les lignes apporter le réconfort de la Foi aux blessés au péril de sa vie ; au service de son sacerdoce. Même une fois, outrepassant sa neutralité d’aumônier, il va, les quatre colonels ayant été tués, le dernier gradé, un commandant blessé, prendre la direction des opérations et ramener les soldats à l’abri !

Son irritation se transformera en révolte lorsqu’il est appelé pour assister un soldat condamné à être fusillé ; non par pour désertion comme cela est écrit mais pour tentative d’assassinat d’un de ses officiers (ras le bol de la tuerie). Ce soldat est totalement mécréant ; dans le peu de temps dont il dispose il arrive à le faire passer du stade indifférent, puis moqueur enfin intéressé. Il lui fera en quelques minutes son éducation religieuse, le baptisera et lui fera faire sa première (et dernière) communion. Tout ce qu’il n’a jamais appris à l’école. Il l’accompagne au poteau puis à genoux près du cadavre il commentera : « Et moi, agenouillé près de lui, je sentis monter dans mon cœur des colères que je n’avais jamais éprouvées de ma vie. Ah ! On m’avait interdit d’enseigner ce petit à l’école et l’on avait eu besoin de moi pour le conduire au poteau ! Bien au-delà de ceux qui défilaient sans paraître comprendre [Selon le règlement, le régiment défile devant le cadavre après l’exécution], mon regard allait chercher ceux qui, embusqués aux arrières confortables, avaient voulu cela. Ceux qui, ayant refusé à ce petit gars de France toute religion, lui avaient interdit toute discipline, toute foi, toute espérance et l’avaient jeté au feu en lui criant : Marche ou crève ! Parce que dans son désespoir ce malheureux sans étoile s’était révolté et s’était jeté sur ses chefs, on l’avait abattu ».
La guerre se termine le 11 novembre 1918. Avec des volontaires qui ont demandé le report de leur démobilisation il va faire le champ de bataille pour retrouver et inhumer dignement ses compagnons de combats. En particulier celui de Wacques, sur le site d’une ferme chèrement défendue et à proximité de laquelle, dans une carrière, à Confrécourt, il a fait sculpter un autel (toujours visible) sur lequel il dira la messe pendant les offensives. A Wacques il va dresser un monument pour les 147 morts retrouvés sur les presque 2.000 tués là quatre ans auparavant et dont les ossements de certains sont à l’air libre.

Il recevra la Croix de guerre avec palmes (7) et sera fait Chevalier dans l’ordre de la Légion d’honneur à titre militaire (rien à voir avec les chanteurs, les cyclistes, les footballeurs etc.).

Alors, lorsqu’en 1924 le Président du Conseil Edouard Herriot [radical-socialiste, franc-maçon qui disait « la politique c’est comme l’andouille, il faut que ça sente la merde mais pas trop » pense expulser à nouveau les Congrégations, l’ancien aumônier des champs de bataille, décoré pour sa bravoure n’en peux plus et écrit une lettre ouverte tonitruante à Herriot : 

 « Eh bien ! Non nous ne partirons pas. Pas un homme, pas un vieillard, pas un novice, pas une femme ne repassera la frontière, cela jamais ! J’ai vécu douze ans en exil, de 22 à 34 ans, toute ma vie d’homme. Je vous le pardonne. Mais le 2 août 1914, à 4 heures du matin, j’étais à genoux chez mon supérieur. C’est demain la guerre, ai-je dit, ma place est au feu. Et mon supérieur m’a béni et m’a embrassé. Par des trains insensés, sans ordre de mobilisation (j’étais réformé), sans livret militaire, j’ai couru au canon, jusqu’à Verdun. Le 20 août, à l’aube, avant la reprise du combat, à la recherche des blessés du 115ème, j’avançais au-delà des petits postes, quand tout à coup, je fus enveloppé par le craquement de vingt fusils, et je vis mon camarade étendu de son long, contre moi, sur la route, la tête broyée. J’ai senti à ce moment que mon cœur protégeait tout mon pays. Jamais je n’avais respiré l’air de France avec cette fierté, ni posé mon pied sur sa terre avec cette assurance.

« Je ne comprends pas encore comment je ne fus pas tué alors, ni vingt fois depuis. Le 16 septembre, j’étais prisonnier devant Noyon, en plein combat ; en novembre, j’étais de nouveau en France et en décembre je retrouvais le feu avec la plus belle des divisions, la 14ème de Belfort. Avec elle, je me suis battu trente mois, jusque devant Mézières, le 11 novembre 1918. J’ai été trois fois blessé, je garde toujours sous l’aorte un éclat d’obus reçu dans la Somme… et, démobilisé, j’ai commis le crime de rester chez moi… Et maintenant vous me montrez la porte !

« Vous voulez rire M. HERRIOT ! Mais on ne rit pas de ces choses. Jamais, pendant cinquante mois, vous n’êtes venu me trouver, ni à Tracy-le-Val, ni à Grouy, ni à Souain, ni au fort de Vaux, ni à Brimont, ni à la Côte 304, ni à Tahure. Je ne vous ai vu nulle part me parler, et vous osez me faire sortir aujourd’hui ? Vous n’y pensez pas ! Ni moi, entendez-vous, ni aucun autre (car tous ceux qui étaient en âge de se battre se sont battus), ni aucune femme, nous ne reprendrons la route de Belgique. Cela jamais ! Vous ferez ce que vous voudrez, vous prendrez nos maisons, vous nous ouvrirez vos prisons – il s’y trouve en effet des places laissées libres par qui vous savez – soit ! Mais partir comme nous l’avons fait en 1902 ? Jamais !

« Nous avons aujourd’hui un peu plus de sang dans les veines, voyez-vous, et puis, soldats de Verdun, nous avons appris aux bons endroits ce que c’est que de s’accrocher à un terrain. Nous n’avons eu peur ni des balles, ni des gaz, ni des plus braves soldats de la Garde ; nous n’aurons pas peur des embusqués de la Politique. Et je vais vous dire maintenant pourquoi nous ne partirons pas. Ce n’est pas de courir au diable qui nous effraie. Nous ne tenons à rien, ni à un toit, ni à un champ. Jésus-Christ nous attend partout et nous suffira toujours au bout du monde. Mais nous ne partirons plus parce que nous ne voulons plus qu’un Belge, ou qu’un Anglais, ou qu’un Américain, ou qu’un Chinois, ou qu’un Allemand, nous rencontrant un jour loin du pays, nous pose certaines questions auxquelles nous répondrions, comme jadis, en baissant la tête : « La France nous a chassés ». Pour l’honneur de la France – entendez-vous ce mot comme je l’entends ? – pour l’honneur de la France, jamais nous ne dirons plus cela à un étranger. Donc nous resterons tous. Nous le jurons sur la tombe de nos morts ! ».

Prêtre, oui, convaincu, totalement, mais aussi homme, vraiment homme ! Comme on dirait maintenant : il en avait !

PERE PAUL DONCOEUR : NOUS NE PARTIRONS PAS !!! Un prêtre qui aurait été Chouan !
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