L'HERMIONE LA TOUCHE TREVILLE 1779-2019, SOUS PAVILLON ROYAL
L'Hermione, la réplique construite en 17 ans selon les plans de sa sœur jumelle Concorde, a touché terre aux Amériques en 2015, 235 ans après son original. Rappelons que la gloire de cette frégate ne repose que sur la qualité de son commandant, Louis- René Le Vassor de la Touche, lors de ses hauts faits et ne doit rien à La Fayette qui n’a fait dessus qu’un aller, comme passager – heureusement pour le bateau - (départ de Rochefort le 21 mars 1780, arrivée à Boston le 27 avril) le retour se faisant à bord de la frégate américaine USS Alliance (commodore John Barry) le 28 décembre 1784 (Revue du Souvenir Chouan de Bretagne N° 45 août 2018)..
Louis-René-Madeleine Le Vassor de La Touche naît, le 3 juin 1745, à Rochefort - dans la province de l'Aunis à la limite de la Saintonge - devenue en 1790 le département de la Charente-Inférieure.
Il devint comte de Tréville au décès de son oncle en 1788.
Entré dans les Gardes-marine en 1758 il prend part aux combats de la guerre de Sept-ans en 1759 sur Le Dragon commandé par son père, du côté de Belle-Ile.
Il est nommé commandant de L'Hermione frégate de 12 armée de 34 canons dont 26 de 12 (calibre qui donne son nom à cette classe de frégate) mise en chantier dans la forme Colbert à Rochefort en 1778, lancée six mois plus tard, armée cinq mois après soit onze mois entre la pose de la quille et les essais à la mer.
C'est Monsieur de La Touche qui va donner la gloire à L'Hermione et non le petit marquis. Dès mai 1779 au large de l’île d'Yeu, après de savantes manœuvres, il capture un corsaire anglais, le 29 mai il recommence et récidive avec trois navires de commerce ; il recevra en récompense la Croix de Saint Louis.
En mars avril 1780 il emmène le gentil marquis aux Amériques. Là Lafayette recevra une gloire quelque peu usurpée (par rapport aux vrais combattants tel Armand Tuffin Marquis de La Rouërie ou l'amiral du Chaffault, Suffren, Rochambeau, de Grasse, Estaing et combien d'autres) sans doute favorisée par ses liens maçonniques avec Washington.
L'Hermione a eu un beau destin sous pavillon fleurdelisé. Après de nombreuses campagnes victorieuses sa carrière va s'achever sous le pavillon tricolore. Le 20 septembre 1793, sous le commandement de Pierre Martin (futur amiral de la révolution, ayant servi auparavant sous l'amiral d'Estaing ou le marquis de Vaudreuil). Le 20 septembre 1793, en protection d’un convoi transportant de l'armement pour Lorient puis Brest, à la sortie de l'estuaire de la Loire, la frégate va s'échouer sur les rochers du plateau du Four, au large du Croisic, vers 18 h et coulera le 21 vers 10 H. Le capitaine Martin quittera le dernier le navire après que le Maître d'équipage ait actionné une dernière fois son sifflet.
Extraits du Procès-verbal du naufrage de la frégate Hermione sur le Four
« Aujourd'hui vingt septembre mille sept cent quatre vingt treize l'an 2ème de la République française une et indivisible, la frégate l'Hermione commandée par le citoyen Martin Capitaine de Vau est appareillé de Mindin dans la rivière de Nantes pour se rendre à Brest avec un convoy d'après l'ordre qu'il en avoit reçu du Ministre.[…] Il la remis entre les mains du citoyen Guillaume Guillemin pilotte cotié de la frégate et provenant du batiment le Phénix qui avait relevé l'Hermione à la station de Mindin. Nous étions au plus près tribord amures sous le petit hunier et le perroquet de fougue pour entretenir un convoy de 12 batiments que je devois mettre devant Brest. A 6 h.1/4 un grand batiment du convoy qui se trouvoit derrière la frégate vira de bord. Je demandois au pilotte pourquoi ce batiment viroit et s'il y avoit du danger à craindre sous le vent. il me repondit que non. Lorsqu'on cria brisants sous le vent le pilotte assuroit que ce n'étoit pas des brisants mais la force du courant qui faisoit cet effet...... A 8 heures du matin la mer se trouvant au 2/3 basse la frégate a donné de la bande dans un instant avec une vitesse incroyable et dans ce mouvement rapide et s'est crevé totalement le coté de tribord. J'ai continué à faire travailler à sauver tous les effets de conséquence qui se trouvoient possible et de les faires transporter à bord du chasse marée ou nous avons été prévenus que si les vents passoient à l'ouest avec force il serait possible dans la position ou se trouvoit la frégate qu'il périroit beaucoup de monde. A la basse mer la frégate nous a paru totallement crevé. L'équipage s'est décidé avoir de l'abandonner et a passé sur les chasse-marées qu'on nous avoient envoyé du Croisic. J'ai abandonné le batiment à 10 heures du matin le dernier avec le maître d'équipage qui a donné trois coups de sifflet pour s'assurer qu'il ne restoit plus personne à bord. Je n'ai que le meilleur témoignage à rendre de l'Etat Major et des principaux maîtres et de tout l'équipage qui se sont tous portés avec le plus grand zèle la plus grande activité à exécuter les ordres que j'ai donné jusqu'au moment ou nous avons abandonné la frégate. On ne peut attribuer qu'a l'ignorance du pilotte costié la perte de la fregate qui paroit infaillible. Malgré tout ce que j'ai pû lui dire il m'a donné toutes les raisons qu'il setoit trompé et qu'il ne se croyoit pas aussi près du Four. Je l'ai amené à terre avec moi et l'ai remis entre les mains du juge de paix avec une dénonciation par écrit par laquelle je demande que ce pilotte soit intérogé publiquement devant tout mon équipage et le public du Croisic, afin qu'il soit constaté juridiquement que c'est par sa faute seulement que la frégate a été mise à la côte ».
Le pilote côtier, le croisicais Guillaume Guillemin est le responsable du naufrage. L’équipage, d’après son commandant a bien manœuvré.
Mais il faut savoir que Le Croisic est une ville en révolte contre le jacobinisme parisien. Après un vote, la population s'était rendue aux Chouans qui, sous les ordres de Thomas de Caradeuc et Guérif de Lanouan, avaient pris Guérande le 18 mars 1793. Guillaume Guillemin aurait-il été un des éléments des Révoltés désirant apporter son récif (sa pierre ou son rocher!) à la révolution, en coulant un bateau de la révolution, voire plusieurs bateaux du convoi ? Les autres capitaines s'étant méfiés et ayant changé de route seule l'Hermione terminera, sous pavillon tricolore, sa glorieuse carrière royale.
Nous serions donc en face d’un acte volontaire de sabordage.
D'accord ce n'est plus la même époque pour la réplique de L'HERMIONE et la marine en bois n'est plus d'actualité comme elle l'était il y a 230 ans. Les lois de la navigation ont changé et il a fallu céder à ces lois : Feux de position électriques, congélateurs pour la nourriture, toilettes agrées, cabestans électriques, moteurs électriques pour les navigations portuaires, navigation par GPS, ce qui a donc demandé la présence de groupes électrogènes, mais aussi de cuisines permettant de nourrir les 80 membres d'équipage. Une mise aux normes du XXIème siècle alourdissant la frégate.L'accastillage, le gréement sont assez conformes à l'Hermione, à quelques détails près. Non c'est vraiment une belle réalisation qui a permis à beaucoup de métiers de retrouver le savoir de leurs ancêtres.