Georges Cadoudal, Athanase Bouvet de Lozier, François-Louis Russilion, Etienne-François Rochelle, Armand-François Polignac, Jules-Armand Polignac, Abraham-Charles d’Hozier, Charles-François de Rivière, Louis Ducorps, Louis Léridant, Louis Picot, Victor Couchery, Henri Rolland, Frédéric Lajolais, Jean-Victor Moreau, Pierre David, Michel Roger, Michel Hervé, Claude Lenoble, Jean-Baptiste Coster, Yves Lagrimaudière, Victor Deville, Armand Gaillard, Noël Ducorps, Aimé-Augustin Joyaut, Nicolas Datry, Louis-Gabriel Burban, Guillaume Lemercier, Pierre-Jean Cadudal, Jean Lelan, Joseph Even, Jean Mérille, Gaston Troche,
« Sont prévenus de conspiration tendante à troubler la république par une guerre civile, en armant les citoyens les uns contre les autres et contre l’autorité légitimement établie délit prévu par l’article 612 de la loi du 3 brumaire An IV » (25 octobre 1795).
ARTICLE 612 : Toutes conspirations et complots tendant à troubler la République par une guerre civile, en armant les citoyens les uns contre les autres, ou contre l'exercice de l'autorité légitime, seront punis de mort, tant que cette peine subsistera ; et de vingt-quatre années de fers, quand elle sera abolie.
Michel-Joseph Troche, Pierre Monnier et Marie-Anne Colasse sa femme, Jean-Baptiste Denand et Sophie Duval sa femme, Jacques Verdet et Catherine Osvalt sa femme, Pierre-Antoine Spin, Marie-Michel Hizay (ont hébergé les "conspirateurs")
« sont prévenus de complicité de ladite conspiration » délit prévu par le même article
Pierre Dubuisson et Madeleine-Sophie Lambotte sa femme, Marie Caron, Simon Gallais et son épouse Jeanne-Aimé Guérard (ont hébergé les "conspirateurs).
« sont prévenus également de complicité de ladite conspiration et en outre d’avoir recélé des individus dénommés dans la liste des soixante désignés comme brigands, signée du Grand juge ministre de la justice, affichée et publiée par ses ordres ; délit prévu par l’article 612 et par la loi du 9 ventôse (29 février 1804) qui condamne à mort tous les individus qui recèleraient Georges et les assassins qui l’accompagnent »
Le premier jour a été consacré aux "formalités" administratives, nom, prénom, âge et qualité des accusés qui avaient été amenés de la prison du Temple pour être mis sous mandat de dépôt à La Conciergerie avant leur présentation au Parquet, la salle au-dessus de La Conciergerie.
Ces formalités terminées en fin d'après-midi ils sont emprisonnés à Bicêtre.
Le lendemain, mardi 28 mai, à 9 heures du matin a commencé le procès en lui-même avec la parole donnée aux défenseurs.
Le premier à se présenter est Me Gauthier défenseur de Coster Saint Victor qui demande à la Cour de se déclarer incompétente pour que son client soit traduit devant la Haute-Cour impériale. En effet le Sénatus Consulte du 17 mai dernier a créé celle-ci pour les "Crimes, complots et attentats contre la sûreté intérieure et extérieure de l'Etat" et a requalifié cette Cour qui n'est plus le Tribunal Criminel de la Seine mais la Cour de Justice Criminelle. Trois jours avant le Sénatus Consulte, le 14, l'Acte d'accusation a été dressé ; il ne peut y avoir d'effet rétroactif. Or le Sénatus Consulte supprime le Tribunal Criminel de la Seine et le remplace par la Cour de Justice Criminelle laquelle n'a pas dans ses attributions de juger ce dont est accusé Cosquer de Saint Victor: "Complot contre la sûreté intérieure de l'Etat". D'autre part à la faveur d'un Sénatus Consulte du 27 février, les jurés sont supprimés des procès pour conspiration, ce qui est une innovation car à cette date il a été su qu'une conspiration contre le Consul existait. Il y a donc un Sénatus Consulte applicable (27 février et l'absence de Jurés) et un Sénatus Consulte non applicable (17 mai et compétence de la Cour).
Me Gauthier met donc carrément en cause la compétence de la Cour de Justice criminelle ! Le droit de juger n'appartient plus aux juges de celle-ci mais à la Haute Cour Impériale, juridiction temporaire composée, selon l'article 104 du Sénatus Consulte, de princes, Hauts dignitaires, Grands officiers, du Ministre de la Justice auxquels sont adjoints soixante sénateurs, quatorze Conseillers d’État et vingt membres de la Cour de Cassation.
C'est là l'aspect étrange de constater que d'après les textes élaborés par le système la Loi ne respecte pas la Loi !
Me Dommanget avocat de Georges Cadoudal, Victor Deville, Yves Rubin-Lagrimaudière, Armand Gaillars, Jean Lelan et Jean Mérille, à l'appui de son confrère Gauthier, demande le renvoi devant une Cour compétente.
Mêmes remarques de la part de Me Billecoq avocat de Charles-François de Rivière, Mes Moynat, Dufour, Blacque, Roussiale, Cotterel, Petit-d'Hauterive qui s'en remettent à la prudence de la Cour.
Le Procureur Général, va arriver à ne "pas se prendre les pieds dans le tapis" en insistant : les lois du Sénatus-consulte ne peuvent pas être morcelées, les arrêtés doivent être bien lus, bien médités, l'Instruction était terminée avant le Sénatus-consulte confiant le Procès au Tribunal criminel devenu Cour de Justice criminelle et que d'autre part la Haute Cour Impériale n'existe pas encore - même si Me Gauthier a mis en exergue que dans ses attendus, l'article 104 s'exprime au présent de l'Indicatif et non au Futur !
La Cour après s'être retirée pour délibérer prononce son arrêt ; elle a été saisie avant le Sénatus-consulte de février (pas de Jurés), a rendu son Instruction avant le Sénatus-consulte du 17 mai (incompétence face à la Haute Cour Impériale). Le Tribunal a changé de nom mais pas de compétence du moment des faits établis et bénéficie de l'inexistence de la Haute Cour impériale à laquelle il manque trois juges. Que le cours de la justice ne doit pas être interrompu ; en conséquence la Cour, sur proposition du Procureur passe outre aux débats.
Et c’est ainsi que ce « procès » s’engage.
A suivre