25 MAI 1871, IL Y A 150 ANS, LES MARTYRS D'ARCUEIL
Le 25 mai les Fédérés évacuent leurs prisonniers de Bicêtre vers Paris pour bien les placer sous la "protection" des Communards. Par la Porte de Choisy, boulevard Masséna, le cortège arrive rue du Château des Rentiers. La foule, menaçante, composée des descendantes des "tricoteuses " et autres mégères (on imagine aisément la scène) entoure le cortège, des cris fusent: «A mort, à mort les calotins, à bas les Dominicains. A la lanterne, les Jésuites !! ». On se dirige vers la mairie du XIIIè arrondissement ; on fait asseoir les prisonniers dans la cour de la mairie. Les membres de la municipalité sont embarrassés et ne savent que faire de ces prisonniers. Sérizier obtient un ordre d'écrou, les prisonniers arrivent à la prison (la chapelle de Bréa), il leur est enfin donné à manger.
Vers 16 H ils sont interpellés dans leur geôle : "Allons, soutanes, levez-vous; on va vous conduire à la barricade, il y a là-bas de l'ouvrage pour vous." Le Père Captier, Prieur, et le Père Cotraut demandent de quoi il retourne " On va vous donner des fusils, et vous vous battrez avec nous". Le Père Cotraut refuse "Nous sommes religieux, nous ne prendrons pas les armes. Mais nous sommes disposés à aller chercher vos morts, et à soigner vos blessés sous les balles".
Traqués, les Versaillais se rapprochant, la situation se détériore pour les Fédérés dont le colonel Sérizier et son adjoint Boin se donnent du courage à grand coup d'alcool.
Enfin Boin aux otages : «Allons les calotins, sortez tous, le colonel vous demande. Avancez ! Sortez un par un, vous êtes libres ».
Les prisonniers aperçoivent le peloton d'exécution. Le Père Cotraut lève le bras "Mon Dieu, est-ce possible ?". Sérizier ordonne le feu. Le Père Captier se tourne vers ses compagnons "Allons, mes Amis, pour le Bon Dieu", et il s'élance.
Parce qu'il bougeait encore, un dominicain reçut trente et un coups de fusil, Sérizier criant: «Tirez mais tirez donc, ce gueux là grouille encore ! ». Tous les prisonniers sont tirés comme des lapins.
13 victimes: 5 Pères Dominicains et 8 laïcs (1 professeur, 1 commis d'économat (22 ans) 2 surveillants, 1 infirmier, 3 domestiques).
C'était le 25 mai 1871, jour du combat de la Butte-aux-Cailles, chant du cygne pour les Communards.
Des neuf bourreaux, seuls Sérizier et Boin seront fusillés après la fin de la Commune.
Ces treize victimes avaient été prises en otage le 19 mai par les Fédérés. Le collège Albert-Legrand d’Arcueil, tenu par les Dominicains, était devenu, lors de l’attaque de Paris par les Prussiens et pendant cette guerre civile, une ambulance neutre protégée par l’emblème de la Croix Rouge (créée par Henri Dunant à Genève en 1864) pour soigner les blessés causés par l'offensive des soldats Versaillais. Cet établissement d'Arcueil se trouve sur la ligne de front.
En vertu de ce titre de neutralité le Supérieur des Dominicains a refusé l'installation d'une pièce d'artillerie dans le parc du collège.
Les Fédérés (soldats de la Commune) commandés par le « colonel » Sérizier (ancien corroyeur nanti d’une profonde haine pour le clergé qu’il accuse de tous les maux) occupent une grande bâtisse voisine du collège, le château de Laplace où un incendie, rapidement maîtrisé s’était déclaré le 17 mai. Ils ont pris prétexte de ceci pour accuser le personnel du collège-ambulance d’avoir voulu faire des signaux aux Versaillais. Les religieuses dominicaines et les femmes de service furent envoyées en prison à La Conciergerie, pleine, puis à Saint Lazare. Les Fédérés, dirigent sur la prison de Bicêtre 26 personnes, Pères dominicains, du personnel enseignant, des élèves.
Comme le cliché des exécutions utilisé dans l'article d'hier celui-ci est aussi un astucieux photomontage réalisé par le photographe Eugène Appert quelques temps après les événements.