VALEURS ACTUELLES ET LA REVOLUTION

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VALEURS ACTUELLES ET LA REVOLUTION

 

Dans sa collection  Hors-série la dernière publication de Valeurs intitulée « Le roman noir de la révolution » appelle quelques remarques. 130 pages sur un beau papier, bien présentées ; mais…

Si l’emballage est beau le contenu appelle quelques réserves.

Déjà, dès son éditorial, François d’Orcival, s’il donne la raison de la convocation des Etats-généraux pour solutionner la crise économique du royaume, omet  d’en expliquer l’origine importante : la Guerre aux Amériques.

 

Extrait de La Revue N°45 de juin 2018 : « Les sommes avancées par le gouvernement royal  français se montent à 32 Millions de Livres  soit 384.000.000 € ; celles versées par le Roi sur sa cassette ne sont pas communiquées mais on peut connaître la somme de 26.000 Livres de l’achat de La Victoire donnés par Broglie et Kalb. Il faut y ajouter le coût de la guerre avec l’Angleterre cause directe de l’engagement du Royaume auprès des Insurgents : 1 milliard de L soit 12.384.000.000 € en tout ». Le budget du royaume est de 475 millions de L en 1789 ; la dette est donc trois fois supérieure d’autant qu’il faut tenir compte des 375 millions de L. de fonctionnement. Ce milliard 32 millions de déficit peut être rattrapé à condition que les classes hautes de la société se serrent la ceinture ce que refuseront la haute noblesse et le haut clergé ; ils s’apercevront trop tard que leur refus a été pire que faire des efforts.

 

A titre comparatif, l’engagement américain en 1917–1918 a coûté aux Etats Unis 33 milliards de $ soit 2.871.000.000 €. Cette somme comprend aussi les fonds fournis aux finances exsangues de la France.

Lorsque la Convention demandera au Congrès américain le remboursement des 20 millions de L prêtés par le Royaume, celui-ci adressera une fin de non recevoir arguant que cet argent a été prêté par le Roi et non par la république !

2.871.000.000 € contre 12.384.000.000 € ; effectivement l’amitié Franco-américaine a un coût.

De cette réunion des Etats généraux va découler un Coup d’Etat lorsqu’ils vont se déclarer Assemblée nationale puis Constituante le 17 juin 1789. C’est là la faute due à la faiblesse du pouvoir politique royal : la réaction est faible et les jusqu’au-boutistes vont se permettre, comme Mirabeau, de résister au pouvoir royal.

C’est là que commence la révolution et François d’Orcival aurait du le signaler. Par contre il dénonce bien les clubs, les libelles, les sociétés de pensée, les gazettes, prédécesseurs de nos actuels média.

 

Page 9 (Arnaud Folch) « 4000 déportés notamment en Guyane » « seuls quelques dizaines survivront ». Il y  eut 4085 prêtres et religieux déportés, bloqués à Bordeaux, Blaye, Rochefort, Saint Martin de Ré, Ile d’Aix, Brouage. Avec ceux décédés en Guyane ce sont 1072 prêtres et religieux qui sont morts – soit 26 %,presque autant que  les camps de concentration nazis - dans des conditions épouvantables. Sur ce nombre 10 prêtres de La Rochelle et 2 de Vendée. La grande majorité des victimes est de Bretagne, Normandie, Aveyron, Belgique.

Page 12 un Bertrand de Barère et page 29 un François Athanase de Charette. Barère a utilisé pendant un temps, bref, le nom d’une terre familial, de Vieuzac. Les Charette recevront de Louis XVIII en 1823 le titre de baron et la particule l’accompagnant.

Page 22 (E. Letty) On entretient toujours la confusion sur les armoires de fer ; celle de Louis XVI et Gamain (qui fut son apprenti forgeur à Versailles) dans l’embrasure d’une porte dans les appartements du roi. Selon Cléry elle ne faisait que (traduit en système métrique) 0,56x 0,40x 0,22 soit 50 Cm; difficile de lui faire sortir tous les documents présentés par Roland. Ou alors cette armoire est la clé USB de l’époque ! Celle de la Constituante aux Tuileries, interdite au Roi, de grand volume, maintenant aux Archives nationales

Page 25, sous la signature de Max Gallo, au pied de l’échafaud « on noue la corde autour de ses poignets » alors que c’est avec son mouchoir que les poignets de Louis XVI furent attachés.

Page 27 (A.Folch), à propos de l’excellent comte de Saillans « déchiqueté à coups de sabre et la tête sciée par un groupe de sans-culottes » ; il fut décapité au sabre sur l’affut d’un canon. Page 30, l’attribution de la guillotine au Dr Guillotin n’est pas exacte car l’instrument connu dans d’autres pays a été modifié par le Dr Louis. Mais c’est vrai que l’on en fit porter la paternité au Dr Guillotin malgré ses protestations.

Päge 37, (Sabine Dusch) les nouvelles religions : le culte de la déesse Raison inventé par Hébert est attribué à Robespierre qui a inventé l’Être Suprême (avant de le rencontrer quelques semaines plus tard). Page 38 le même auteur parle de la déportation vers la Guyane en 1792 ce qui est totalement faux les non assermentés étant expulsés de France ; ils iront se réfugier en Espagne, en Angleterre, en Autriche, en Prusse. La déportation vers la Guyane commencera sous le Directoire en juin-juillet 1798 (173 morts sur 385 déportés).

Page 52, (Ph Delorme) toujours l’habituelle « Prise de la Bastille » alors que ce fut une reddition (mortelle).

Page 67 (A. Folch) La place de la Révolution (ex place de la Concorde). Ah ???

Page 68, (T. Rolando) « Lyon, 9 octobre 1793 […] Au moment même où les Vendéens ont traversé la Loire ». Alors qu’à cette date ils sont à Treize Septiers, seront le 17 à Cholet avant de traverser le 18 ! « Joseph Fouché […] est un oratorien défroqué ». Terme impropre : Fouché  est un clerc tonsuré comme enseignant du collège de l’Oratoire à Nantes ; il n’est pas prêtre !

Page 89 (J.Besnard) à propos d’André Chénier auquel Fouquier-Tinville assène « la république n’a pas besoin de poètes » à l’instar de ce qu’il aurait déclaré à Lavoisier « la république n’a pas besoin de savants » pour Lavoisier, Fouquier n’était pas là ; ce serait une pure invention de l’abbé Grégoire. Il en est sans doute pareil pour Chénier car cette phrase imbécile n’apparaît nulle part ; sa notoriété vient de sa répétition telle une incantation !

Page 92 (Séchér) on apprend que Barère est ministre, en juillet 1793, ce qu’il n’a jamais été de tout son parcours politique ; il est rapporteur du Comité de salut public auprès de la Convention ; page 93 on découvre que le nombre de victimes en Vendée est de 117.000 alors que même Jean-Clément Martin parle de plus de 200.000 ! Page 94 « Certains départements comme l’Eure décrètent ainsi le massacre des Vendéens réfugiés sur leur territoire ». Le terme exact est Brigands qui désigne de façon péjorative les vendéens certes mais aussi les révoltés connus sous le nom de Chouans qu’ils soient de Bretagne, de Normandie ou du Maine. Page 95/96 « Mais avec la mort de Cathelineau frappé par une balle perdue les Blancs échouent devant Nantes ». Visé par un cordonnier tapi au premier étage d’une maison de la place Viarmes, blessé d’une balle en plomb, le 29 juin, sans aucun doute à la jointure de l’épaule, il décède de la gangrène le 14 juillet soit 16 jours plus tard. Autres perles du même auteur  dans la même page : « Circonstance aggravante la mort des principaux chefs blancs, entre le 29 juin et le 16 octobre 1793,  D’Elbée (fusillé le 6 ou 8 janvier 1794), Bonchamps (mort le 18 octobre 1793), Lescure (4 novembre 1793) », « la tragédie de Savenay entre les 21 et 25 décembre 1793 » (Blain le 21, Savenay le 22 au soir ; tout est consommé le 23, cite« Westermann : il n’y a plus de Vendée, citoyens républicains » « j’ai écrasé les enfants sous les pieds des chevaux »  phrases qui n’apparaissent pas dans le rapport de Westermann à la Convention mais sont reprises en boucle depuis Crétineau-Joly. « camps à ciel ouvert sur les îles de la Loire » Il n’y a jamais eu de camps sur les îles de Loire, ni de noyades organisées au Pellerin. Quant aux « mariages républicains » noyades par couple « dans des positions obscènes…père et mère, frère et sœur, un curé –prêtre aurait été mieux -et une religieuse » cela n’a jamais existé que dans l’esprit de cerveaux tordus. Page 97 on apprend que « l’on coupe les têtes pour les disséquer » « les noyeurs qui chantent pour couvrir le bruit des plaintes ». Quelle imagination ! On apprend aussi que le pharmacien d’Angers Proust était « par ailleurs physicien et alchimiste (sic) » auquel il fut demandé de créer un gaz pour tuer les Vendéens (demande qui aurait été faite à Fourcroy par Turreau). Mais il y a deux Proust : l’apothicaire Joachim Proust  qui aurait traité le sujet sans aucun succès, et Joseph-Louis Proust Physicien et chimiste qui n’a pas travaillé sur le gaz se voulant asphyxiant !

 

Page 98 Soljenitsyne. Le passage du discours du 25 septembre 1993 le plus applaudi après:

« La Révolution française s'est déroulée au nom d'un slogan intrinsèquement contradictoire et irréalisable : liberté, égalité, fraternité. Mais dans la vie sociale, liberté et égalité tendent à s'exclure mutuellement, sont antagoniques l'une de l'autre! La liberté détruit l'égalité sociale - c'est même là un des rôles de la liberté -, tandis que l'égalité restreint la liberté, car, autrement, on ne saurait y atteindre. Quant à la fraternité, elle n'est pas de leur famille. Ce n'est qu'un aventureux ajout au slogan et ce ne sont pas des dispositions sociales qui peuvent faire la véritable fraternité. Elle est d'ordre spirituel ». Dommage de ne l’avoir pas mis.

Page 103 (Ph. Delorme) « le 17 mars (1794 ?) à la Chapelle Basse-mer, des femmes enceintes sont écrasées sous des pressoirs ». Quelle horreur ! Mais un corps n’est pas une pomme ou du raisin. Surtout dans un pressoir construit entre 1800 et 1820. Page 104 A propos de Turreau « ce qui ne l’empêchera pas de se rallier en 1814 à Louis XVIII qui en fait un chevalier de Saint Louis » ; en réalité proposé au tableau Turreau a eu la décence de mourir avant de recevoir cette haute distinction donc il n’a jamais été Chevalier de Saint Louis.

 Page 106 (A. Folch) Carrier « personnage falot et alcoolique inventeur des effroyables noyades de masse ; débarquant à Nantes après l’écrasement des Blancs à Savenay  (le 25 décembre 1793) » ENCORE ! « les célèbres autant qu’abominables mariages républicains» « Convoqué une première fois devant le Comité de Salut public il est absous mais rappelé dans la capitale. Après Thermidor, Carrier est à nouveau décrété d’accusation. Jugé le 27 novembre il s’en prend à la Convention toute entière » « Aussi incroyable que cela puisse paraître, sa commune natale de Yolet a fait reconstruire la maison où il vécut ». Ah bon ?

Page 116 (Philippe Conrad) au sujet de la Chouannerie (2 pages sur 130 !) « La chouannerie ne se confond pas avec l’aventure vendéenne. Elle la précède d’abord avec la conspiration bretonne du marquis de La Rouërie » Aussi stupide que de dire que L’OAS A ÉTÉ CRÉÉE PAR L’ARMÉE FRANÇAISE. «plus difficile de saisir l’esprit qui animait ces jusqu’au-boutistes du combat contre le nouveau régime : un rêve fait de la nostalgie des anciennes libertés aristocratiques que défendaient déjà au temps où s’édifiait la monarchie absolue les conjurateurs hostiles à Richelieu et les frondeurs ennemis de Mazarin » NAVRANT « Alors que la mémoire vendéenne porte en elle une leçon d’histoire exemplaire, l’esprit chouan survit dans la nébuleuse anarchiste de droite » AMUSANT.  Cadoudal  « Incarcéré à Brest avec sa famille, il doit sa libération au coup d’Etat anti-Robespierre de Thermidor ». ÉVADÉ TROIS MOIS APRÈS THERMIDOR ! « Il joue un rôle décisif dans l’opération royaliste de Quiberon. Après l’échec de celle-ci il doit se résigner à traiter mais rallume la guerre dans l’Ouest en 1799 ». PRESENT A CARNAC (débarquement) ABSENT A QUIBERON (bataille et défaite) FAIT SA SOUMISSION COMME LES AUTRES CHEFS EN 1796 REPREND LES ARMES EN OCTOBRE 1799. Il signe la paix le 12 février à Saint Avé après la victoire du Pont du Loc’h (24 janvier 1800).

 

En résumé, nous pouvions espérer un vrai travail de recherche de la part de Valeurs Actuelles ; le résultat est décevant car l’article reprend toutes les redites, erreurs et approximations en boucle sans aucun avancement sur cette période étrange et cruelle de 1792 à 1815. C’est se moquer du lecteur qui ne connaît pas cette page d'Histoire !

Si les autres Hors série sont aussi navrants ce n’est pas très encourageant pour porter un nouveau regard sur l’Histoire frelatée !

 

 

 

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