18 OCTOBRE 1798 - MARQUIS de SURVILLE - 18 OCTOBRE 2018
IL Y A 220 ANS
Joseph - Etienne, marquis de Surville, était commandant en 1789 dans le régiment Colonel-Général de l'infanterie légère française et étrangère où il a immanquablement rencontré Louis de Frotté, le futur célèbre chef chouan de Normandie.
Né le 16 juin 1755, à Valence dans la Drôme, dans une très ancienne famille de la noblesse vivaroise, dont on a la trace au XIIIe siècle, il embrasse dès 16 ans le métier des armes et entra au régiment de Picardie, renommé régiment Colonel-général en 1780.
Parti pour la guerre aux Amériques il sert sous les ordres de Rochambeau où il se distingue par son courage et son intrépidité. Il rentre en France en 1783 et passe la plus grande partie de son temps dans diverses garnisons du régiment Colonel-Général. Il est à Brest en 1783, à Besançon en 1784 où il est initié à la maçonnerie (Loge La Modeste), ce qui ne perturbe pas son catholicisme.
Il se marie le 28 février 1786 avec Marie-Pauline d'Arlempdes de Mirabel. À la suite de son mariage, qui lui apportait le marquisat de Mirabel, Joseph Etienne prit le titre de Marquis. Ils eurent un enfant malheureusement décédé à l'âge de 4 ans.
En 1789, il prend part aux assemblées de la noblesse du Vivarais à Villeneuve-de-Berg. Il émigre à Coblence lors de la révolution.
Le 20 septembre 1792, il est à la bataille de Valmy. Sa compagnie est licenciée à Spa. Il se réfugie à Liège. Il rejoint Condé en mai 1793. En France, comme il est émigré, ses biens et propriétés sont vendus, dans le Gard, en Ardèche. Il quitte l’armée de Condé le 6 janvier 1795 et rentre clandestinement dans le Vivarais (Vivaroye à l’époque : Vive le Roy).
Il s’engage dans la « chouannerie » locale qui recouvre l’Est et Sud-est du Massif Central (Rouergue, Cévennes, Margeride, Gévaudan, Vivarais, Pays du Velay, le Forez et les Monts du Lyonnais). Il côtoie le comte de La Motte (ou Mothe), Dominique Allier (dont le frère Claude, Prieur de Chambonas a été guillotiné pour faits de « chouannerie » le 5 septembre 1793). Que du beau monde !
Arrêté à Mayres transféré à Aubenas il arrive à s’échapper.
Pour ses brillantes campagnes, il est promu Chevalier dans l’Ordre royal de Saint Louis le 10 juillet 1796 et c’est Louis XVIII qui le décore le 8 mars 1797, pas dans le Vivarais bien évidemment mais à Coblence où il est allé quémander de l’aide. Décoré mais on ne lui confie pas de commandement. Il revient dans son pays en 1797. Il prend, avec ses hommes la ville de Pont Saint Esprit le 30 septembre 1797.
Après un nouveau voyage en Suisse, Louis XVIII ayant fait de lui son émissaire pour le Midi de la France, il revient sous un faux nom mais il est arrêté à Tiranges près d’Yssingeaux, proche du Puy en Velay, suite à une trahison pour de l'argent: la belle aventure se termine le 2 octobre 1798. Les révolutionnaires du Puy avaient eu une trop grande peur qu’il reconstitue l'armée du comte de La Mothe (assassiné le 5 octobre 1797 dans la prison du Puy en Velay), pour ne pas le passer par les armes.
« Ledit jour, 16 fructidor, sur les quatre heures du matin, ledit Jelaigue, brigadier de gendarmerie accompagné de tous les gendarmes de sa brigade et d'un détachement de la 16è demi-brigade pour lors stationnée à Craponne, se transportèrent audit lieu de Gervais, dans la maison de ladite Théaulaire, veuve Brun, où ils savaient des personnes suspectes de cachées ; Où étant arrivés, laditte Théaulaire s'opiniâtra d'abord de les laisser entrer, en leur disant qu'ils n'avaient pas droit de venir faire des visites dans sa maison ; que ce refus ayant redoublé les soupçons de cette force armée, ils entrèrent dans laditte maison, où, après avoir fait plusieurs recherches, et étant parvenus à la chambre au-dessus du colidor, où étoit un grenier à moitié démonté, adossé au mur, et s'étant aperçu que certaines planches de ce grenier pouvaient se mouvoir à volonté, ils le tournèrent aussitôt et trouvèrent, à la partie du mur que couvrait ce grenier, une ouverture propre au passage d'un homme, laquelle ouverture conduisait dans un souterrain. Ils entrèrent et y arrêtèrent le marquis de Surville, Charbonnel- Jussac, Dominique Allier, et le nommé Robert, armés de fusils et d'espingoles, lesquels quatre individus ont été depuis suppliciés. »
Avec ses compagnons le marquis de Surville est emprisonné au Puy, sans oublier Marie-Anne Théoleyre. Cette dernière, poursuivie comme leur complice devant le tribunal criminel, fut défendue par Vissaguet qui la fit acquitter, le 19 frimaire an VI.
Après un procès de l’époque il est condamné à mort le 17 octobre, par une commission militaire, pour faits d’émigration et de conspiration.
Le 18 octobre il est amené devant l’église Saint Laurent. « D'un pas assuré, il descendit l'escalier de sa prison ; sa bouche et son cœur priaient. » Il monta sur le tombereau, et, calme et souriant, traversa la rue Grangevieille en saluant les amis accourus sur son passage».
« Une foule immense de sans-culottes, de garde-nationaux, de troupes de ligne, gendarmerie, chasseurs et canonniers avait envahi les abords de Saint-Laurent pour assister à la mort de Surville.
D’un pas assuré, il descendit l’escalier de sa prison ; sa bouche et son cœur priaient. Il monta sur le tombereau, et, calme et souriant, traversa la rue Grange-vieille en saluant les amis accourus sur son passage. Le cortège sortit du Puy par la porte Pannessac.
Monsieur, dit-il à l’officier qui commandait le détachement, je crois inutile de vous demander un prêtre fidèle ; ce serait d’ailleurs l’exposer à de grands malheurs. Veuillez donc,
s’il vous plaît, m’envoyer le curé constitutionnel.
Le prêtre arrive : « Je vous plains, Monsieur, d’avoir donné ce funeste exemple de prévarication ; je sais néanmoins que, dans le cas où je me trouve, je puis me servir de vous. Veuillez m’écouter ».
Le prêtre schismatique, attendri, remplit son pénible ministère. M. de Surville reçut ses consolations avec une piété et une douceur angéliques.
Un sergent s’avança pour lui bander les yeux : « Comment ! dit-il, depuis ma plus tendre enfance je sers mon Dieu et mon Roi, et vous ne me supposez pas assez de courage pour voir le plomb mortel ? »
Et, mettant la main sur son cœur, il s’écria : « C’est ici qu’il faut frapper ! »
Il est atteint de plusieurs balles dont trois en pleine tête.
Il avait 43 ans et quatre mois. Son épouse décède en 1848.
Charbonnel fut envoyé à Lyon où il fut condamné à mort le 15 novembre 1798 et fusillé presque aussitôt. Robert subit le même sort dans le Puy-de-Dôme où il fut transféré. Dominique Allier, transféré en toute hâte à Lyon, y subissait la même condamnation.
Dans cette église Saint Laurent, au Puy en Velay, se trouve un gisant de Bertrand du Guesclin car y reposent ses entrailles. Bertrand a eu plusieurs sépultures: ses entrailles au Puy, ses chairs à Montferrand (Clermont-Ferrand), son cœur à Dinan, ses ossements à Saint-Denis. En effet le roi Charles V voulait qu'il soit inhumer à Saint--Denis. Mais Bertrand, mort le 13 juillet devant Châteauneuf de Randon devenait intransportable à cause de la chaleur. Au Puy, on procéda à l'ablation des entrailles qui furent inhumées dans l'église Saint-Laurent ; avant Montferrand il fallut se décider à faire bouillir le corps, seule façon de disperser le nuage de mouches qui suivait le cortège. Ses chairs furent inhumées dans la chapelle des Cordeliers – laquelle fut détruite à la Révolution et le tombeau profané.