5 MAI 1821 SUR L’ÎLE DE SAINT HELENE, IL Y A DEUX CENTS ANS.

Publié le par culture

5 MAI 1821 SUR L’ÎLE DE SAINT HELENE, IL Y A DEUX CENTS ANS.

Mort à Saint Hélène le 5 mai 1821 l’empereur déchu termine ce jour là son exil terrestre de 5 ans et 10 mois. Il ne semble pas avoir eu d’assistance spirituelle durant ces années. Comme le note Madame Claire de Rémusat dans ses Mémoires : « il donnait trop d’attention à ce qui se passait dans ce monde pour s’occuper beaucoup de l’autre » « l’immortalité de son nom lui paraissait d’une bien autre importance que celle de son âme ». (Tome II page 309).

L’exploration de ces Mémoires est passionnante et dépeint certains aspects de Buonaparte devenu Napoléon. Lisons quelques exraits :

L’Empereur au moment de sa grande puissance demandait à des personnes de son entourage « ce qu’on dirait  (de lui) après sa mort » ; chacun s’empresse à un compliment ou à une flatterie. « Comment vous êtes embarrassés pour savoir ce qu’on dira ? On dira : Ouf ! ».

Il répétait qu’un de ses oncles lui avait dit, enfant, « qu’il gouvernerait le monde parce qu’il avait coutume de toujours mentir ».

Napoléon se confiant à Talleyrand : « Je suis lâche, non, essentiellement lâche ; je vous donne ma parole que je n’éprouverais aucune répugnance à commettre ce qu’ils appellent dans le monde un acte déshonorant » (Tome I page 108).

Talleyrand à Madame de Rémusat (à propos de Napoléon) : « Ce diable d’homme trompe sur tous les points. Ses passions mêmes vous échappent ; car il trouve moyen de les feindre quoiqu’elles existent réellement ».

M.de Rémusat fut appelé à dresser un plan  de l’entourage du tout frais Empereur ; ce plan fut jugé par ce dernier trop simple alors qu’il n’était que sage et mesuré : « il n’y a pas là assez de pompe, tout cela ne jetterait pas assez de poudre aux yeux » ! (Protocole, titres de noblesse, décorations, vaisselles, bijoux etc.).

« L’établissement de l’Empire parut douteux jusqu’à la bataille d’Austerlitz (2 décembre 1805) ; alors la servitude fut dorée et parut acceptable et l’on vendit la liberté au prix de la gloire ».

Aux artistes, aux orateurs, aux musiciens, aux poètes, aux peintres : « Ne citez que moi, ne chantez, ne louez, ne peignez que moi ; je vous achèterai ce que vous voudrez mais il faut que vous soyez tous vendus ».

Page 349 (Tome I), Madame de Rémusat parle d’assassinat à propos de la mort de Pichegru (qui se serait auto-strangulé). Et cite Talleyrand à propos de cette mort "Qu’elle est arrivée bien subitement et bien à point " (Tome I page 349).

« L’Empereur n’aimait aucun de ses maréchaux. Il disait assez volontiers du mal d’eux et quelque fois du mal assez grave. Il les accusait tous d’une grande avidité qu’il entretenait à dessein par des largesses infinies "Davout est un homme à qui je puis donner de la gloire, il ne saura jamais la porter "(Tome II page 370).

Son appréciation des femmes est intéressante : « Il faut  que les femmes ne soient rien à ma Cour ; elles ne m’aimeront point mais j’y gagnerai du repos ». Il tint parole. Nous ornions ses fêtes, c’était à peu près notre seul emploi (Tome II page 372).

Madame de Rémusat, née Claire Elisabeth de Vergennes, est la fille de l’Intendant de Louis XVI, petite-fille de l’ambassadeur du Royaume pour la Suisse et petite-nièce du Grand Ministre du même roi. A l’âge de seize ans elle épouse le comte Auguste-Laurent de Rémusat chez les parents duquel sa mère et sa sœur s’était réfugiées pour échapper à la Terreur qui guillotina son père (43 ans) et son grand-père (75 ans) le 24 juillet 1794 (trois jours avant la chute de Robespierre).

Emprisonnée quelques temps elle fera la connaissance  et se liera d’amitié avec une certaine Joséphine dont le mari a été guillotiné. Cette Joséphine à sa libération fera la connaissance d’un général d’artillerie qui commencera sa carrière ascendante par un assassinat en masse de trois cents personnes par canons armés à mitraille sur les marches de l’église Saint Roch.

Joséphine de Beauharnais épousera en 1796 le général Bonaparte. Son mari devenu Premier consul en 1799 elle retrouvera son amie puis elle l’engagera comme dame de compagnie, Dame du Palais ; son mari, le futur comte d’Empire de Rémusat se retrouvera rapidement Préfet du Palais des Tuileries et Grand chambellan. Ils seront ainsi dans l’intimité de la famille consulaire puis impériale étant les témoins privilégiés de la conduite de l’empereur et de petits secrets sur son comportement.

Ces mémoires de Madame de Rémusat occupent trois tomes ; 410 pages (Tome I), 415 pages (Tome II), 411 pages (Tome III). Elles furent publiées par son petit-fils Paul de Rémusat, chez Calmann Lévy, Paris, 1880. Le texte n’a pas été retouché par le petit-fils qui a seulement ajouté des notes en bas de page ; par exemple pour corriger l’affirmation par sa grand’mère que Pichegru a été assassiné il note que : « la médecine légale a fait de grandes avancées en 70 ans et a démontré que l’on pouvait s’auto-stranguler ».

Napoléon, pour les Chouans.

Il en fut un irréductible adversaire dès le Consulat et jusqu’au mois de mars 1804 ; il démantèle le réseau que Georges Cadoudal avait monté dans le but de l’enlever. Mais auparavant il aura essayé (comme la Convention et le Directoire) les Faux-chouans et même la tentative d’assassinat ; Gabriel Antoine de Becdelièvre et Louis Lainé le paieront de leur vie et disparaitront à tout jamais, en 1800, aux environs de Le Tour du Parc (presqu’île de Rhuys) exécutés par les Chouans après la découverte de poison sur eux.

Après que Georges ait refusé de demander sa grâce au nouvel empereur (depuis le 18 mai 1804) proposée par Réal pour lui uniquement et non pour ses compagnons d’infortune sa demande d’être exécuté en premier comme il l’avait fait demander par le même Réal lui sera refusé par le nouvel empereur.

La vindicte de Napoléon poursuivra aussi l’adjoint de Georges Cadoudal, Louis-Charles de Sol de Grisolles, qui restera enfermé dans les bas-fonds de la prison de l’Abbaye d’octobre 1804 à avril 1814. Il fut torturé par arrachage des ongles des mains mais il ne parla pas. Il sortit de prison en 1814 à moitié aveugle et très affaibli ; cela ne l’empêcha pas de reprendre le combat à la fin des Cent jours.

Pour ses opposants Napoléon avait aussi rétabli la torture en particulier par ce qu’il appelait le « serrage des pouces » entre le chien d’un fusil et la batterie, ce qui inévitablement écrasait en les disloquant les articulations.

Il exilera de Paris à Issy les Moulineaux M. Emery qui lui avait fait l'affront de refuser l’Evêché d'Arras pour services rendus au moment du Concordat (contrairement à l'abbé Bernier qui avait accepté Orléans).

C’était il y a 200 ans, en l’île de Sainte Hélène.

 

5 MAI 1821 SUR L’ÎLE DE SAINT HELENE, IL Y A DEUX CENTS ANS.
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :